Une tragédie liée à la fureur du Furan
Le 26 août 1834 en fin d’après-midi de violents orages s’abattent sur la région stéphanoise. La foudre allume des incendies dévastateurs et la pluie qui tombe en abondance jusqu’au milieu de la nuit fait déborder tous les cours d’eau. Le Furan, à cette époque nommé Furens que l’on a souvent traduit par furieux à cause de son régime torrentiel, recevant toutes les eaux de ses affluents va rapidement déborder et tout emporter sur son passage.
À cette époque, à Ratarieux, un peu avant la confluence du Riotord, petit ruisseau venant du Bois-Monzil, il y avait un pont qui permettait de franchir le Furan en direction de La Fouillouse. Un peu plus loin, au bord de l’eau sur la rive gauche, se trouvait une ferme appartenant au vaste domaine d’André Simon Nicolas-Boutérieux, fabricant de rubans à Saint-Étienne.
Vers 23 heures, le pont contre lequel s’étaient amassés les arbres et débris de toutes sortes charriés par le Furan est emporté laissant passer une vague destructrice qui submerge la ferme dans laquelle une famille de huit personnes vivait. Seul le père, après avoir inutilement cherché à arracher à la mort femmes et enfants, put trouver son salut en s’échappant par le toit et en s’agrippant à un arbre comme il le raconte dans cet émouvant témoignage.
Jean-Pierre Januel avait épousé à Villars le 16 août 1825 Benoîte Odin et le couple s’était installé avec les parents de cette dernière, Pierre Odin et Fleurie Vincent, pour les aider à l’exploitation de la ferme.
Peu après la naissance du premier enfant, Pierre Odin est mort en 1827 à l’âge de 72 ans. Quatre autres enfants virent le jour dans les années qui suivirent.
Ainsi, lors de cette nuit dramatique de 1834, vivaient dans cette maison, le père Jean-Pierre Januel 39 ans, la mère Benoîte Odin 42 ans enceinte, sa mère Fleurie Vincent 73 ans et 5 enfants, Jean-Pierre 8 ans, Antoinette 7 ans, Claude 4 ans, Jean François Xavier 3 ans et Jeanne-Marie 20 mois.
Les corps de la grand-mère et de quatre enfants ont été retrouvés sur la commune de La Fouillouse dès le lendemain mais celui de la mère seulement le surlendemain. Cependant, un enfant ne figure pas sur les registres de l’état-civil de La Fouillouse comme de Villars, pourtant le père a bien signalé la disparition de cinq enfants. Il s’agit de Jean François Xavier, tout porte à croire que son corps n’a pas été retrouvé.
Sur le plan ancien reconstitué à partir de trois planches différentes, on voit le Furan avec son affluent le Riotord, le pont qui a été emporté et la ferme entourée d’un cercle.
Un grand élan de solidarité a vu le jour pour venir en aide aux nombreux sinistrés. Outre l’intervention des finances publiques, une souscription a été ouverte et notre compatriote Jules Janin est intervenu pour qu’un maximum d’aides soient apportées, il a ainsi pu récolter 25 000 F.
Les principaux théâtres parisiens ont donné des représentations en faveur des sinistrés de la région. Plus étonnant, l’appel à la souscription de Jules Janin a été entendu jusqu’à Saint-Louis du Sénégal.