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Une femme hors du commun

Le cruel destin de Marie Charra, veuve Michon.

Deux fois veuve, à 18 ans puis à 41 ans, un premier mari tué à la mine, le second qui l’emmène au Portugal, elle fut la mère de 9 enfants. Trois de ses fils seront tués au combat lors de la Grande-Guerre. Voici son histoire.

Parmi les femmes de la commune qui ont vécu un parcours hors du commun, celui méconnu de Marie CHARRA mérite qu’on s’y arrête. Elle voit le jour en 1858 à La Talaudière où son père est mineur. Elle se marie à l’âge de 17 ans en 1875 à Saint-Étienne avec Jean Baptiste FAURE, mineur au Soleil. Un mariage de courte durée puisqu’elle se retrouve veuve à 18 ans, son mari étant une des 186 victimes de la catastrophe minière du puits Jabin le 4 février 1876. Un an plus tard elle se remarie avec Edmond MICHON, lui aussi mineur. La famille habite alors dans le quartier du Cros à Saint-Étienne. De cette union naîtront 9 enfants : 6 garçons et 3 filles.
En 1886, elle suit son mari au Portugal où celui-ci exerce le métier de contremaître dans une fonderie de verre près de Porto. En 1889 c’est le retour en France et une installation définitive à Villars rue de Curnieu. Son mari y reprend son activité de mineur. En 1893 il est élu conseiller municipal et siégera dans les municipalités successives de Charles FESSY, Louis AUBERT, Antoine POYET et Antoine PENOT jusqu’à son décès à Villars en 1899 à seulement 47 ans.

Trois fils morts à la guerre.

Marie est de nouveau veuve à seulement 41 ans. Elle ne se remariera pas. Au recensement de 1911 elle apparaît comme exerçant le métier de buandière à Curnieu avec sa soeur Claudine. Elles habitent non loin du lavoir public.

Et puis arrive la Grande Guerre. Cinq de ses fils seront mobilisés, trois n’en reviendront pas : Jean Marie (né en 1881 à Saint-Étienne, marié et père de deux enfants, tué au combat en Artois fin septembre 1914 à l’âge de 33 ans) ; Denis (né en 1892 à Villars, tué par un obus en Champagne en novembre 1915 à l’âge de 23 ans) et François (né en 1888 au Portugal, tué en Alsace lors de la bataille des frontières fin août 1914 à l’âge de 26 ans).

Elle aura donc pleuré deux maris et trois fils, tous morts prématurément. On pourra aussi y ajouter sa fille Jeanne décédée en bas âge en 1897. Mais la buanderie de la veuve MICHON située rue de Curnieu continuera de fonctionner jusqu’à son décès le 24 octobre 1921 à l’âge de 63 ans. Deux de ses fils lui succéderont à la tête de cette petite entreprise familiale, sans beaucoup de bonheur. Antoine (né en 1886 au Portugal) décédera en 1925 à l’âge de 39 ans puis Joannès (né en 1890 à Villars) en 1936 à 46 ans. On ne vivait pas vieux à cette époque.

La presse locale évoque à la fin de l’année 1957 la fermeture de la buanderie de la rue de Curnieu, suite à l’avènement des machines à laver. Voilà ce qu’en dit le journal : Cette buanderie – « chez MICHON » comme on disait couramment – a eu sa renommée avec sa nombreuse clientèle, qui accomplissait chaque jour, à la main, une tâche assez pénible mais dont les braves lavandières en supportaient les difficultés par certains commérages courants et pas méchants. D’ailleurs « Villars-Revue » du 31 janvier 1926 notait dans l’un de ses couplets

« À Curnieu c’est notoire,
Chez MICHON le lundi,
On lave la chemise,
De tous les mercantis ».
Ainsi donc place au progrès.

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