« La construction des Castors de Villars, c'était une formidable aventure ! »
En 1953, 18 familles se lançaient dans l’aventure de construire par eux-mêmes leurs maisons : 13 rue du Triolet et 5 aux Marronniers. Une incroyable aventure que Bernard Emonet a connu enfant dont il a aujourd’hui retracé tout l’historique.
Votre maison de la rue du Triolet a une histoire bien particulière ?
Ici c’était autrefois le pré de la vogue. On était après-guerre. Il y avait déjà d’autres « Castors » ailleurs. En mars 1953 il s’est constitué l’association des Castors de Villars dénommée « Entre nous ». L’objectif c’était de construire sa maison soi-même avec l’aide de tous. Pour cela deux terrains ont été achetés. Un aux Marronniers où il s’est construit cinq maisons de cette manière et un autre terrain ici, appelé terrain de sport, à côté du terrain de foot où treize maisons ont été construites dont celle de mes parents qui a été la dernière. Ça fait donc 18 familles qui se sont lancées dans cette aventure. C’était des gens modestes qui n’avaient pas beaucoup d’argent. Juste une petite mise de départ de 75 000 anciens francs.
Comment un tel projet peut-il aboutir ?
Il y avait 30% de mineurs, ça aide pour faire des fondations ! Ils avaient presque tous des métiers manuels, il y avait un menuisier, un plombier, un maçon.Le projet c’était l’entraide. Ils devaient s’engager à faire 2000 heures de travail sur deux ans, ce qui est énorme ! Et ils n’avaient pas le droit de partir en congés. Il y avait des amendes de prévues. Ils étaient jeunes et courageux. C’était le curé Moulin qui pilotait tout ça, il était le président de l’association. Il avait un coté très social, il aimait aider les gens. Leur idéal c’était « pour nous, par nous, entre nous ». C’est Mme Fachetti, l’institutrice, qui faisait le suivi avec Bonfils qui travaillait à la Manu et qui faisait les imputations de temps passé.
L'aventure a commencé quand ?
En 1953 c’est l’administratif, les travaux ont commencé en juin 1954. D’abord aux Marronniers. Il a fallu un an et demi pour la première maison ! Alors pour 18 maisons ça aurait fait beaucoup de temps. Ils ont donc changé de technique. Ils faisaient les fondations et jusqu’à la dalle et après ils sous-traitaient à un maçon pour les murs et ils reprenaient pour la toiture. Puis ils sous-traitaient pour les utilités : électricité, plomberie, chauffage. Une chambre pour chacun et une salle de bain, quand on sortait d’un deux pièces et qu’on se lavait à l’évier ou dans un baquet, ils avaient l’impression de vivre en Amérique ! En 1956 toutes les maisons étaient hors d’eau. Et la dernière, celle de mes parents fut habitée en 1957. Au bout du compte c’était une bonne affaire. Le curé s’occupait des emprunts, ils ont eu des aides. En convertissant les sommes, ça leur serait revenu à 72 000 euros pour une maison qui vaudrait aujourd’hui près de 300 000 euros.
Et aujourd'hui vous racontez cette histoire...
C’est une histoire fantastique. J’ai connu ça tout petit. Et puis on était tout un groupe, la bande des Castors. On avait beaucoup d’estime pour nos voisins. Je suis un grand bricoleur. Quand j’ai repris la maison de mes parents qui était en bon état, je me suis rendu compte du travail énorme qu’ils avaient fait, avec les moyens du moment. Mais je n’avais même pas un plan de la maison. On m’a aiguillé vers Mme Fachetti. Elle m’a dit qu’elle avait une vieille valise dans son grenier où il y avait tout ça. On est descendu chez elle pour aller la chercher. C’était en octobre 2011 et avec tous ces documents je me suis mis à écrire cette histoire.